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Flash Mood

A se changer en roi,
A hurler à la lune,
A traquer la fortune,
Tout ça pour trainer son poids
[Noir Désir, Comme elle vient <= Les Fatals Picards, Noir(s)]

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Aujourd'hui c'est RAT, 10h-22h

Comme annoncé, aujourd'hui je participe à mon premier Read-A-Thon.

De 10h à 22h, je vais donc passer un maximum de mon temps à lire, lire, lire, et encore lire. Pour se motiver, il y a les autres participants et les cheerleaders enthousiastes, principalement sur Facebook, et c'est pas impossible que les sms chauffent aussi.

J'ai pas pensé à refaire un peu de ravitaillement hier, alors j'espère que ce qu'il me reste en stock suffira. Pour compenser j'ai testé une activité du magazine "Petites mains" avec la confection de petits oeufs en pâte à base de chocolat blanc, sucre glace et miel.
J'ai fait le ménage, disposé les jouets de mon titi de façon à toujours avoir de quoi l'occuper d'une main, pour qu'il ne vienne pas jouer à m'attaquer les mains ou, pire, mon livre.

J'ai encore des lessives et du repassage à faire, et j'aurais voulu continuer à travailler sur des tentatives d'oeufs à décorer, et j'ai un courrier à faire, mais je me dis que ça me fera des pauses salutaires ^^

Le principal risque de distraction va être pour moi le jeu facebook Cityville, je pense...

On va bien voir.
Je pense donc que je vais tenir au courant de mon avancée dans le RAT surtout sur Facebook et/ou par sms avec les coupines, mais je vais aussi tenter d'en rendre compte ici-même par de régulières mises à jour, quitte à copier-coller directement!

Lelf et Vert font aussi un suivi sur leurs blog, de ce que j'ai vu (je ne fais pas ce RAT aussi sérieusement que je le pourrais, je suis plutôt relativement "à l'arrache", ça tombe bien c'est un "just for fun" ^^). EDIT: il y a donc aussi Olya et Shaya qui le font ^^ - ainsi que Zach' que je suis toute contente d'avoir entraîné par un passage éclair de dernière minute ou presque sur le MdE

Pour voir la musique que j'écoute pendant ce temps, consultez mon compte LastFM!



*

08h et quelques: Après avoir un peu traînassé au lit et encouragé les rathoniens nocturnes, je fais un mini tour de jeux et de vademecum en prenant mon cappuccino, Lavington Bound dans les oreilles.
Mes pensées vont surtout vers "par quel livre vais-je commencer mon RAT?"...

10h00: GO! Allons-y!  J'attaque avec le manga Black Butler, tome 2 que je reprend.

11h40: Ouf, j'ai fini le Black Butler 2 (que j'ai repris depuis le début pour me remettre dedans). 190 p. Je file faire une pause miam, j'ai un énorme creux depuis déjà un moment, et en même temps je vais hésiter sur ma prochaine lecture ^^

12h35: Pause cuisine - ma tentative de petits oeufs (vu dans le magazine d'activités enfantines "Petites Mains") est en train de se figer dans le four-garde-manger, allégé de quelques lichées. En gros c'est du chocolat refondu, quoi, le miel et le sucre glace n'apportent pas une grande différence. Et je suis vraiment pas au point mais je vois un peu mieux comment m'organiser pour la prochaine fois, parce qu'il y aura une prochaine fois je pense ^^
J'ai attrapé de quoi grignoter, arrosé de jus de cranberry-pomme-raisin que je teste, et j'attaque l'anthologie "Magiciennes et sorciers" éditée aux Imaginales 2010. C'était pas vraiment prévu... comme prévu ^^



15h50: Après avoir laborieusement lu 20 pages de l'anthologie, je tenais pas en place alors je me suis rabattue sur une BD, c'est donc "La ligue des Gentlemen Extraordinaires" que j'ai attaqué. A un tiers de la fin, je fais une petite pause pour me changer les idées.
J'en ai déjà fait une mini il y a une heure pour lancer une lessive et faire la litière du titi, pourtant nettoyée hier mais qui schlinguait un poil.

Le titi lui-même est sorti de son panier pour venir jouer avec mes cheveux quand je me suis installée sur le canap' alors je suis revenue sur mon fauteuil d'ordi, tourné vers la fenêtre, puis il est parti siester sur le lit alors j'ai pu reprendre possession du canap'.
Depuis il s'est réveillé et joue un peu en faisant les aller-retours avec la chambre, mais j'arrive à l'occuper d'une main.

Vers 16h30, j'improvise un mini goûter et reviens lire devant l'ordi pour entrecouper ma lecture de surf en pointillé.



17h20:
Woohoo, je viens de finir la BD de la Ligue des Gentlemen Extraordinaires! (146 p.) Avis un peu mitigé, y'a de l'idée et c'est plutôt sympa mais d'une manière générale c'est un peu forcé, coincé, et ça gâche un peu. Je passe maintenant à World War Z, lecture du mois du Cercle d'Atuan.

19h00:
J'ai lu 40 pages de World War Z mais je m'ennuie... J'attrape "La poésie française pour les nuls" marqué à la page 271, ainsi que quelques chips de légumes, et je reviens vers l'ordi.




21h00: Languissante de nouveauté pour le palais, je pêche un vieux paquet de Speculoos au fond de mon placard, lui adjoint une tablette de chocolat vétérane elle aussi, et j'étrenne mon solitaire de fondue à chocolat tout en continuant tranquillement à savourer le chapitre sur Victor Hugo de "La poésie française pour les nuls".



Je le finis pile à 22h tout rond, à la page 304, j'aurais donc avancé ce bouquin de 33 pages.
Mon mot de la fin: "Les mots sont les passants mystérieux de l'âme"...




Rendez-vous demain pour le bilan et tout, parce que là c'est pas que je sois vraiment fatiguée mais j'ai besoin de faire autre chose!
(comme... aller au lit et bouquiner un peu pour m'endormir, par exemple. *autre chose*, quoi )
 

Starting blocks pour le RAT

Comme je le disais, demain je participe à mon premier Read-A-Thon, c'est-à-dire que de 10h à 22h je vais tenter de lire un maximum, soutenue par les autres rathonniens et les cheerleaders, par sms, facebook, etc.

J'ai l'intention de faire le maximum de tâches ménagères aujourd'hui pour être disponible au maximum demain, malgré mon tichat qui saura certainement détourner mon attention ^^
Pour l'instant je procrastine plus que je n'agis, donc je suis plutôt partie à passer en revue ce qui pourrait convenir au mieux pour mes lectures rathoniennes, et ça donne ça.

Livres susceptibles de me passer sous la main:

- La poésie française pour les nuls (Jean-Joseph Julaud) *suite*
- L'ombre du vent (Carlos Ruiz Zafon) *suite*
- Le Manuscrit des Parfaits (Julien Deslembre) *suite
- [manga] Black Butler (Yana Toboso) *suite*
- [manga] Fairy Tail (Hiro Mashima) *suite*
- L'anneau-monde (Larry Niven) *suite*
- [BD] Hauteville House *relecture+suite*
- [BD] La Ligue des Gentlemen Extraordinaires (Alan Moore)

- Contes de villes et de fusées (anthologie par Lucie Chenu)

Et/ou sûrement d'autres trucs...

J'ai hâte d'y être et de voir ce que ça donnera, combien de livres et/ou de pages j'arriverai à lire, si je tiendrai tout ce temps-là en gérant les pauses, et tout ça!
 

[BD] Terre d'accueil (Alessandro Tota)

Ca fait un moment que je devais le chroniquer, celui-là, je l'ai même relu entièrement en voulant le feuilleter pour me remettre dedans...



Et bien m'en a pris, car j'en ai ressenti une émotion doublée, j'ai lu avec un autre oeil, par rapport à la première lecture où j'étais restée dans un état d'esprit plus léger.

On suit les traces du Yéti, ni plus ni moins, qui avait quitté les sommets pour s'installer dans la vallée, où la douceur du climat a fait tomber tous ses poils mais où il coulait des jours paisibles. Jusqu'à ce qu'une invasion déchettière le pousse à reprendre son baluchon, et le voilà qui débarque à Paris, grosse masse rose noyée dans la foule, qui ne s'exprime que par "gnu", réduit à vivoter et se faire humilier à faire le ménage dans un centre de télécommunication...

Et puis il fait la connaissance de sa voisine de palier, Caterina, une jeune italienne pétulante, fêtarde, dotée d'un sacré franc-parler...



...ainsi que deux de ses amis, Volker qui vient d'allemagne et Alessandro qui vient d'italie comme elle.
Evidemment, là on ne peut s'empêcher de noter la coïncidence avec le nom de l'auteur, et le fait que Caterina essaie de travailler sur un projet de BD: on devine des éléments autobiographiques, mais entremêlés.
Heureusement, entre nous, parce que le Alé de la BD n'a pas le plus beau rôle ^^

Et donc, petit à petit Yéti s'intègre à cette petite bande et passe de bons moments...



et d'autres moments un peu plus mitigés...



Mais peu à peu sa nouvelle vie se fissure, pour diverses raisons qui en altèrent le sens et le font douter...



...et il va finalement s'éloigner une fois de plus, en forme de parenthèse qui se ferme.

C'est une très belle histoire sur l'immigration, la difficulté de s'intégrer, la barrière de la langue, la solitude, et la société... La vie, même.

Les couleurs et les traits d'un style simple et assez naïfs renforcent les contrastes, le déroulement de la vie avec ses joies et ses moments moins bons, apportant une lumière toute simple, parfois crue. Comme dans la vie, quoi.
 

La perle (John Steinbeck)

C'est par simple curiosité que je me suis intéressée à ce livre dont une lectrice convaincue avait parlé avec une ferveur communicative.
Le nom de l'auteur, Steinbeck, me disait quelque chose, mais ce n'est que maintenant que je fais le rapprochement avec "Des souris et des hommes"...



A défaut de résumé éditeur, le premier paragraphe, introductif:

"Dans la ville, on raconte l'histoire d'une grosse perle - comment elle fut trouvée, puis perdue à nouveau ; l'histoire de Kino, le pêcheur, de sa femme Juana et de leur bébé, Coyotito. Et comme l'histoire a été si souvent racontée, elle est enracinée dans la mémoire de tous. Mais, tels les vieux contes qui demeurent dans le coeur des hommes, on n'y trouve plus que le bon et le mauvais, le noir et le blanc, la grâce et le maléfice - sans aucune nuance intermédiaire. Si cette histoire est une parabole, peut-être chacun en tirera-t-il sa propre morale et y découvrira-t-il le sens de sa propre vie. Quoi qu'il en soit, on raconte dans la ville que..."


Et voilà, on se met à suivre Kino, sa famille et ses voisins, des gens pauvres et simples qui se contentent de peu. Jusqu'au jour où un bébé est piqué par un scorpion et qu'il faut l'aide du médecin cupide et hypocrite.
Les parents, tout entiers à la douleur du danger de voir mourir leur enfant, vont chercher d'autres perles d'huîtres en espérant rapporter assez pour obtenir l'attention et les services de l'homme de science.
Mais ils pêchent bien plus, une perle énorme, la plus grosse jamais vue, une vraie fortune.

A partir de là les ennuis ne font que commencer, et Kino ne sera plus jamais serein ni heureux...

C'est un conte moral, quoi. Avec une belle vision des autochtones réduits à la misère des pays coloniaux, un brin de misogynie, et une illustration complète de l'appât du gain éveillé par la fortune de l'autre, la cupidité, et jusqu'où ça peut aller...

C'est assez intéressant et dans un style qui fait que ça se lit vite, et ma foi cette lecture n'était pas déplaisante. Sans plus, mais pas mal.


     
 

La Quête des Livres-Monde, 2: Le livre des lieux (Carina Rozenfeld)

Comme prévu après la découverte du tome 1 qui m'avait agréablement surprise et bien plu, je viens d'engloutir aussi le deuxième tome de la trilogie de la Quête des Livres-monde, dont le dernier volume est à paraître le mois prochain, si je ne m'abuse.




Zec et Eden sont deux adolescents originaires de Chébérith, une lointaine planète jadis détruite par l'Avaleur de Mondes.
Au cours d'une première aventure, ils ont déjà récupéré le premier Livre-Monde, dans lequel est enregistré une partie de la mémoire de cette planète afin de la recréer un jour. A présent, ils doivent retrouver le second Livre-Monde. Mais un événement inattendu se met en travers de leur chemin. Leur quête s'annonce d'autant plus dangereuse que l'Avaleur de Monde rôde, plus que jamais décidé à achever ce qu'il a commencé : détruire Chébérith et tous ses habitants...



Eh bien ça se confirme: c'est vraiment une bonne série jeunesse, je trouve.

L'intrigue est très bien gérée, on prend plaisir à voir le suspense se renouveler et même quelques fils semés pour la suite.

L'attitude de ces djeun's est toujours aussi authentique, l'usage du portable et d'internet banalisés est très bien exploité sans en faire trop et sans maladresse, et on croise même un geek dans la plus pure tradition au sens premier du terme, le type high tech et hacker en herbe d'autant plus pâlichon qu'il est albinos.

On traverse aussi les émois de l'adolescence, comme on l'avait déjà ébauché dans le tome 1, et ça pourrait très facilement tomber dans le gnangnan mais ça ne le fait pas.
Là aussi on a des personnages avant tout humains, qui ne se fourvoient pas dans les stéréotypes. Pourtant on est bien dans les sentiers battus, l'hésitation entre 2 filles, la première idylle vite désenchantée, la révélation qui nous crevait les yeux depuis des lustres, la brouille à rabibocher, la rivalité à gommer, et l'aventure par-dessus qui change la donne ou plutôt l'accélère: rien que de très classique.

*
"Etait-il normal de n'avoir rien à partager avec sa copine? Non, certainement pas. Lui, il rêvait d'une relation amusante et plein de complicité.
(...)
Zec comprenait parfaitement la jeune fille et il ne lui en voulait pas de ressentir ces besoins, mais il ne voulait pas remplacer le père de Léa. Il trouvait cela malsain et surtout, il voulait être aimé pour ce qu'il était lui. Au moins un petit peu..."
*

Et pourtant ce n'est pas too much, et ça c'est fort.

Bien sûr c'est subjectif et je n'exclue pas la possibilité qu'un autre lecteur ne soit pas de cet avis, mais personnellement la guimauve me fait fuir à toutes jambes et c'est souvent le point noir qui me gêne plus qu'autre chose dans une lecture, surtout de romans jeunesse, alors quand je ne ressens pas cette mièvrerie mielleuse ça me semble bon de le relever ^^


Les héros sont très anti-héros, en somme, et vérifient régulièrement que ce n'est pas d'avoir des ailes et/ou d'avoir le sort d'un monde sur les épaules qui fait de soi un super-héros invincible et que ça a plutôt tendance à sacrément compliquer la vie.

Et tous les détails de crédibilité sont soigneusement étudiés: le fait que les héros soient mineurs et tout ce que ça peut impliquer dans la vraie vie, par exemple. Ou leur attitude avec leur famille à qui ils doivent cacher leurs aventures invraisemblables et pourtant réelles. On a l'impression que l'auteure a pensé à tout, au moindre détail prosaïque qui donnerait un coup à la plausibilité de son histoire, et ça j'aime beaucoup.

Le seul petit doute que je pourrais avoir concerne le fait que dans ce tome, plusieurs personages jusque là "étrangersé se révèlent tout d'un coup déjà dans la confidence.
Jusque là ça reste encore crédible vu les explications qui les justifient, mais c'est pas loin d'être too much et "comme par hasard".

Mais j'ai cru comprendre que par la suite les proches ne seront plus mis à contribution, ce qui là encore est habile pour éviter les écueils.

J'ai donc très hâte de voir sortir le tome 3, et je compte au moins m'acheter le tome 1 pour l'avoir à moi et le faire dédicacer aux Imaginales
Et continuer à explorer cette auteure autant que possible, aussi!

 

L'oeil de Pâques (Jean Teulé)

Le deuxième livre qui a accaparé mes pauses déjeuner ces derniers temps fut un nouveau (- pour moi - tout est relatif) Teulé, parce que vous avez sûrement remarqué que plus ça va, plus je suis adepte de cet auteur, parce que le titre me semblait particulièrement approprié à une lecture d'avril, parce que l'illustration de couverture est tirée d'un tableau que j'aime beaucoup (Ophélie de Jules-Elie Delaunay) bien qu'il m'en rappelle surtout celui de Millais, mais dont la petite retouche ici m'alléchait grandement...




Il s'agit d'un polar qui ressemble à un conte...

L'histoire commence 15 millions d'années avant le crime et se termine 21 jours plus tard
(le temps d'une plaquette contraceptive).
Sept personnages arrivent à Calais. Ils sont sept coquilles brisées. Il leur manque à tous des éléments de bonheur. Mais parce qu'un crime a fleuri sur un crâne, ils vont se rencontrer...
Parmi tous ces gens, il y a Pâques, 23 ans et splendide. Ella a un oeil rose sans irise ni pupille. Sa mère l'a appelée Pâques parce que son oeil ressemble à un petit oeuf intact couché sur son visage.


Eh ben je suis toujours aussi fan de Jean Teulé!

Au début on se demande dans quoi on s'est embarqué tellement ça part dans tous les sens, et pourtant il y a déjà des symétries, des jolis retours de miroirs...

Et très vite on ne cherche même plus à deviner où tout ça va bien pouvoir nous mener, et on se laisse porter par la savante désinvolture du tarabiscoté d'une simplicité limpide et autres oxymores du même tonneau

C'est lyrique autant que parsemé de très prosaïque et direct.
C'est intéressant quand on a quelques références communes aux influences de l'auteur, bien que la plupart du temps la source soit clairement indiquée, mais j'ai l'impression que d'avoir lu d'autres trucs de lui, ça m'aide à mieux tout apprécier maintenant que je le connais un peu et que j'ai une idée de ses mécanismes et de l'état-d'esprit, de son univers.

C'est complètement décalé, incroyable, farfelu, dispersé, et pourtant tellement crédible, tout est plausible, tout se relie, tout est à des années-lumières et si proche, et tout colle.

Je ne sais vraiment pas comment en parler.

Faut s'accrocher, hin. Mais c'est jouissif, jubilatoire. J'accroche totalement, j'adhère, j'adore. C'est une patte qui m'est maintenant familière et qui me transporte à chaque fois.

Deux petits extraits pour la forme, histoire d'en parler un peu mieux que tout ce que je pourrai bafouiller en étant si loin d'être exhaustive ou même de parvenir à résumer l'essentiel...

*

"L'enfant est une petite fille. Une nymphe solitaire. Une ombre voyage sur son corps translucide. C'est l'ombre furtive d'un coléoptère...
(...) Elle est née avec un globe oculaire entièrement rose sans iris ni pupille, un oeil comme on en voit sur les portraits de femmes peints par Modigliani. Cette enfant superbe, c'est de la peinture de musée.
Son oeil droit ressemble à un petit oeuf intact, de chocolat au lait rose, couché sur son visage. A la naissance, quand la mère a vu son enfant, elle l'a tout de suite appelée Pâques!
- Il y en a qui s'appellent Noël, Toussaint, Ange ou Jésus... Aux Antilles, c'est Fête-Nat. Toi, ce sera Pâques..."

*

"Je vais vous raconter comment on receuille la résine de cannabis. J'ai lu ça avant-hier, dans un livre de botanique, en veillant la dépouille de l'Anglaise... lance Amédée, bouche sèche et parapluie par-dessus la tête.
- Il se drogue, le médecine légiste? demande le juge.
- Mh...
- ...Au printemps, les plantes mâles et femelles du chanvre indien fleurissent. A l'intérieur des fleurs mâles apparaît un pollen. A l'intérieur des femelles, une résine collante... Et le vent transporte le pollen des mâles vers la résine des femelles.
- Ces fleurs n'ont pas besoin d'insectes? demande Pâques.
- Mes parents se sont rencontrés sans l'aide de personne... raconte Bondieu.
- Mais, à la floraison, les paysans décapitent les fleurs mâles. Et les femelles, en attente de pollen, sécrètent davantage de résine. Elles mouillent comme les filles qui désirent l'amour...
- Ma mère voulait un garçon... dit Bondieu.
- Plus elles attendent, plus elles mouillent! Alors, régulièrement, les paysans raclent la résine entre les pétales et c'est ça, le cannabis: du besoin d'amour!"
 

Les treize roses (Jesus Ferrero)

Ces derniers jours, mes repas ont été accompagnés de deux livres qui ont su m'alpaguer assez fort pour que je les ramène du boulot et les y remette peu après, comme ça m'arrive de temps en temps.

Le premier fut celui-ci, dont je n'arrivais pas à détacher mes yeux de la couverture (tirée de la mise en scène de Barbe Bleue par Pina Bausch, pour info, même si c'est sans rapport ^^)
:



Jesus Ferrero développe ici, de façon romanesque, un épisode oublié de l'immédiat après-guerre civile espagnole. Treize jeunes femmes, certaines encore mineures, de l'organisation communiste de Madrid, sont arrêtées, jugées et exécutées.
Après leur mort, on commence à les appeler "Les treize roses", en souvenir du poème de ce nom écrit par l'une d'elles. Ferrero imagine leurs derniers jours, depuis leur arrestation jusqu'à leur exécution, et compose une sorte de tragédie antique, un chœur ou chacune des condamnées vient tour à tour sur le devant de la scène et joue le rôle du coryphée.

C'est très bien écrit et fort émouvant, comme on peut s'en douter. Du moins c'est l'effet que ça a eu sur moi.
Cela dit c'est une lecture qui demande une certaine concentration, une certaine imprégnation, et une lecture qui prend son temps, bien que paradoxalement je l'ai vraiment englouti d'une traite sans voir passer les pages.

On suit une vingtaine de personnages de très près, avec leurs caractères et personnalités très disparates, leurs liens entre eux qui s'entrecroisent, leurs passés et leurs entourage... On pourrait s'y perdre facilement, mais les particularités de chacun aident à bien identifier chacun et à distinguer qui est qui au gré des aller-retours - là-dessus, je pense que le fait que je l'ai lu d'une traite a bien aidé aussi.

Ce qui peut perdre aussi, c'est la confusion qui déteint sur le lecteur, la confusion qui s'empare de ces toutes jeunes femmes arrêtées, emprisonnées, jugées très arbitrairement et expéditivement, et finalement exécutées, dans l'Espagne franquiste et toute sa noirceur et son sang versé...
La confusion qui gagne leur esprit pendant leur détention principalement, alors qu'elles font des va-et-vient entre les meilleurs souvenirs de leur jeune vie, l'incertitude de leur sort, l'enfermement et leurs stratégies pour tenir, et la pensée des êtres chers dont elles se languissent...

On a aussi quelques points de vue extérieurs, et des coïncidences fortes, qui rajoutent une couche dans l'émotion.

La veillée avant l'exécution est particulièrement folle, décousue, et poignante.


Le genre de livres intenses que j'apprécie beaucoup, bien qu'à petites doses  (histoire de ne pas se mettre à tout voir en noir ^^)

 
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